Béjart, dernier géant de la danse européenne
«Je crois que l'on meurt toujours à temps»
Maurice Béjart est mort hier au CHUV à l'âge de 80 ans. Il souffrait du coeur et des reins depuis plusieurs années. Le monde de la danse pleure «le plus grand maître du XXe siècle», qui a su amener le public au ballet contemporain. Son oeuvre lui survit. La première du «Tour du monde en 80 minutes» a lieu le 20 décembre à Lausanne.
Mort d'une étoile
«Il est sans doute déjà en train de faire danser les étoiles...» De quel plus bel adieu pouvait rêver Maurice Béjart, qui s'est éteint jeudi peu après minuit? Patrick Dupond, ancien danseur étoile de l'Opéra de Paris, a su trouver les mots.
Des mots qui auraient sans doute reçu l'agrément du «plus grand maître de la danse du XXe siècle», converti à l'islam chiite depuis 1973. Maurice -Béjart disait ne pas craindre la mort,car «elle est une certitude», ni l'heure où elle se manifeste: «Je crois que l'on meurt toujours à temps», a-t-il déclaré il y a peu à l'ATS. «Le temps est compté différemment pour chacun, mais on meurt à temps.»
Le compte à rebours a commencé il y a plusieurs années, et le chorégraphe français installé à Lausanne le savait. Il était très malade. Hospitalisé il y a un mois, sorti pour convalescence, puis admis à nouveau au CHUV la semaine dernière, il devait y suivre pendant des semaines un traitement pour le coeur et les reins. L'heure a décidé de prendre un peu d'avance.
Répétitions jusqu'à la finJusqu'à la fin, le créateur du Boléro, du Sacre du printemps et de plus de 230 chorégraphies aura surveillé le travail de sa compagnie, le Béjart Ballet Lausanne, créée en 1987.
Il est brièvement sorti de l'hôpital quelques jours avant sa mort, pour assister aux répétitions de son dernier spectacle, le Tour du monde en 80 minutes, dont la première mondiale est programmée comme prévu le 20 décembre à Lausanne.
Le spectacle partira ensuite à Paris, puis en tournée internationale.
Pour son 80e anniversaire - qui allait être le dernier - Maurice Béjart a créé une Vie du danseur racontée par Zig et Puce, un clin d'oeil malicieux reprenant ses plus grandes créations. Un retour sans nostalgie sur sa fabuleuse carrière de danseur puis de chorégraphe et de professeur.
Celui qui s'est mis à la danse à 14 ans, sur les conseils d'un médecin lui suggérant «de fortifier ainsi son corps malingre», n'a plus quitté les planches.
Maurice Berger a aimé la scène tout de suite, au point d'aller chercher en coulisse son pseudonyme de Béjart. Un bel hommage à Molière, qu'il vénérait, dont l'épouse s'appelait de son nom de jeune fille Armande Béjart.
Né à Marseille le 1er janvier 1927, Maurice est le fils du philosophe Gaston Berger, sur les traces duquel il commence par marcher. Sa licence de philo en poche, il abandonne les études mais garde Nietzsche, lui qui devait monter Zarathoustra en 2005 et se confier dans un livre d'entretiens.
Ainsi danse Zarathoustra l'an dernier. C'est à Londres et à Paris qu'il acquiert sa formation de danseur classique. Il signe sa première chorégraphie, L'oiseau de feu, en 1952.
Très vite, Béjart reproche au monde de la danse de pratiquer «un art coupé des masses» et s'emploie à travailler autrement. Peu soutenu en France, il quitte son pays avec le Ballet du XXe siècle pour la Belgique en 1960, puis pour Lausanne en 1987, où il a monté une nouvelle compagnie et fondé une école, qui devraient toutes deux lui survivre.
Adieu la compagnie! Vu sur la
Note de Papyroutier : Dans les années 80 (encore à l'époque du Shah), alors que je "faisait" régulièrement la ligne Suisse Téhéran en camion, et que pour un de ces voyages j'étais accompagné par ma fille Astrid, nous avons rencontré incidament dans un "Bar" de Tehéran Maurice Béjart et quelques amis de sa troupe, ils donnaient des représentations labàs, ils nous ont invité le soir du "relache" a partager leur repas du soir.....mémorable et fantastique moment passé avec eux .